Ça par exemple!
Au théâtre Royal du Parc, une fracassante équipe théâtrale ne cesse de réinventer l’opus indémodable de Jules Verne et l’Angleterre du XIX e siècle. Un vrai régal. Ils ont dit que c’était la dernière première … Faut-il vraiment les croire ? Depuis les débuts du spectacle, il y a huit ans, lorsque Thierry Debroux écrivait le premier édito du premier spectacle qui ouvrait sa toute première saison comme nouveau directeur du prestigieux théâtre Royal du Parc… la créativité, l’intelligence, l’humour, la joie théâtrale ne cessent de parcourir les planches brûlantes de ce lieu mythique.

Complètement steampunk, Thierry Janssen maître d’œuvre à l’écriture est 100% moderne et impertinent. Il combine avec une indescriptible verve éléments historiques et anachronismes succulents dans un récit de science-fiction bourré de suspense.
La pièce, plébiscitée par les spectateurs semble d’ailleurs bénéficier d’une énergie propre qui ne cesse d’enchanter et de dérouler des richesses de cœur inouïes. Les thèmes sont toujours les mêmes : le questionnement, l’aventure, le voyage, le choc des cultures, la place de la femme dans la société, l’argent, le temps, les valeurs qui nous font vivre…
Les décors sont toujours aussi étonnants par leur merveilleux agencement et leur beauté graphique. Les costumes? On ne pourrait plus appropriés et hauts en couleurs. Les accessoires ? Des objets dotés d’une âme, des pépites d’imaginaire ! …Le jeu de l’équipe ? Fracassant. Oui ! Capitaine. Et le rythme? Supersonique.

Mais le spectacle a évolué sans cesse depuis 2011, puisant à l’envi, dans l’actualité, une matière de joyeux chansonniers. Xavier Percy se faufile dans une vingtaine de rôles hilarants aux côtés de Pierre Poucet et de Thierry Janssen, le Falstaff de la pièce… Enfin, Jonas Jans et Nathan Fourquet-Dubart jouent savamment aux indiens de toute catégorie! Allan Beurms a concocté pour cette nouvelle version 2019.0 une création vidéo qui charpente l’ensemble de manière élégante et fine. Jasmina Douieb a cédé sa placez à Ana Rodriguez, une perle de princesse indienne, à la délicieuses diction, plus vive et pétulante que jamais et Stéphane Fenocchi crève littéralement l’écran dans son inspecteur Fix plus grand que nature. Presque à en voler la vedette à Monsieur Phileas Fogg, l’auguste grincheux mourant de peur devant un grain de sable : un très digne Alain Leempoel serti comme un diamant dans le flegme britannique. Fix est partout, ennemi juré de Passepartout et de son maître. Même quand il n’est pas là, il croit qu’on l’appelle! A chaque apparition, le public regorge de plaisir, car sans lui le spectacle serait juste une histoire de voyage contre la montre, pleine d’émotions, certes, de rebondissements et d’aventure,oui! mais sans le sel du comique personnifié! Là, on adore le voir se tourner lui-même en ridicule. Avec Stéphane Fenocchi, on creuse les perfidies humaines qui font basculer le monde : l’envie, l’ambition démesurée, l’avarice, l’appât du gain, la jalousie, les rêves de puissance. On adore son rôle de vilain, c’est d’ailleurs comme si celui-ci avait même pris de l’envergure depuis la création du spectacle, car il contraste si bien avec le tandem Phileas Fogg et Passepartout.

Passepartout est livré clés sur porte, valise à la main, en retard de sa note de gaz, à l’affut d’un rôle de domestique dans la tradition de Scaramouche qu’il épouse à merveille. « Il n’est contorsion, posture ni grimace, que ce grand écolier du plus grand des bouffons, ne fasse et ne refasse en cent et cent façons. Scaramouche est à la fois un musicien accompli, qui joue de la guitare, un excellent mime, susceptible, par exemple, d’exprimer l’effroi durant plusieurs minutes, et un formidable acrobate, puisqu’à quatre-vingt-trois ans, dit-on, il peut encore donner un soufflet avec le pied. « Les postures et les gestes de Scaramouche […] sont capables de faire éclater le monde» De faire rire le plus sérieux de tous les papes ! Aussi comédien que circassien, Othmanne Moumen a dans ce rôle, un de ces chien et une pêche incroyable. Branchez-vous, il vous galvanise en trois temps, trois mouvements, en deux enjambées et deux retours de poiriers, en un mot comme en cent: il est spectaculaire, à lui tout seul. Tout s’efface autour de ses généreuses pitreries en cascades. Vous le voyez tour à tour fondre comme une bougie au soleil et exploser comme une bombe de rires, sortie d’une boîte de farces et attrapes. Vous avez alors quinze ans et le monde entier à portée de main ! « And always look on the bright side ». Monthy Python (1979).

Dès le début, le ton avait été donné, d’une manière très « No Sex Please, We’re British (1971) » et « All you need is love ( 1967) ». Big Ben for ever trône dans la vidéo…immuable horloge du temps. Et on se presse d’ajouter une sixième étoile à ce spectacle porte bonheur.
Brexit ? Connais pas! Quod erat demonstrandum !
Dominique-Hélène Lemaire pour Arts et Lettres
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Avec: Stéphane FENOCCHI, Nathan FOURQUET-DUBART, Jonas JANS, Thierry JANSSEN, Alain LEEMPOEL, Othmane MOUMEN, Xavier PERCY, Pierre POUCET, Ana RODRIGUEZ
Mise en scène: Thierry DEBROUX
Assistanat: Catherine COUCHARD
Scénographie et costumes: Ronald BEURMS
Lumières: Nathalie BORLÉE et Noé FRANCQ
Vidéos: Allan BEURMS
Musique de la chanson finale Pascal CHARPENTIER
Photos: ZvonocK
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Durée 2h30 entracte compris